Sarcophage (détail), Vatican, Museo Pio Cristiano, Lat. 179, n° 31536, vers 350.
LES ŒUVRES PALÉOCHRÉTIENNES
Les œuvres
paléochrétiennes recensées, une quarantaine environ, datent au plus tôt et pour
la plupart du IV° siècle (vers
320-420)
et sont des œuvres funéraires localisées en Italie, France, Espagne et Afrique
du Nord.
DANIEL ET BEL
L’épisode de Daniel
et Bel ne semble pas avoir été représenté. Il pourrait être évoqué
cependant dans les scènes où Daniel empoisonne le Serpent par la seule présence d’une colonnette ou
d’un pilier (sur
huit sarcophages et un verre doré), d’un autel renversé (sarcophages de Saint-Sébastien
de Rome et du musée du Latran) ou d’un temple (sarcophages de Grozon, de
Malpasso et de Vérone). L’idole de Bel n’est certes jamais
représentée et l’autel peut être tout autant celui du Serpent que celui de Bel mais il reste néanmoins probable que les scènes évoquées synthétisent les
deux épisodes.
Couvercle de sarcophage (détail), Vatican, musée du Latran, Lat. 136, IV° siècle.
DANIEL ET LE
SERPENT
La scène de Daniel
empoisonnant le Serpent semble, pour sa part, avoir été très souvent
illustrée. Elle est représentée sur une vingtaine de sarcophages (cuve ou couvercle) dans un décor
en frise continue ou bien rythmée
d’arbres ou de colonnettes, parmi d’autres scènes tirées des deux Testaments et
est le plus souvent située à l’une des extrémités de la frise. Elle se retrouve
sur le coffret-reliquaire en ivoire de Brescia et orne près d’une dizaine de
verres dorés gravés retrouvés dans des sépultures (scène du fragment d’assiette du
British Museum de Londres, IV° s. ; scène accompagnée de Daniel entre
les lions, de Suzanne et les vieillards et du Péché originel
sur la coupe d’Homblières du musée du Louvre).
Coffret-reliquaire (lipsanoteca eburnea), ivoire, Brescia, museo cristiano, vers 370.
Coupe en verre gravé, trouvée à Homblières (Aisne), près d'Abbeville, vers 350-360, conservée au Musée du Louvre.
Dans ce contexte
funéraire, la scène de Daniel empoisonnant le Serpent, comme les autres
scènes qui l’accostent (Daniel
entre les lions, Histoire de Jonas, Résurrection de Lazare…), participe de
la victoire sur le mal et évoque la rédemption et la résurrection. Par le geste
de la boule qu’il tend de la main droite, Daniel rend ainsi la pareille au
serpent de la scène du Péché originel parfois représentée en parallèle (coupe d’Homblières, sarcophage
d’Arles n° 27 et sarcophage du Latran) et devient un Nouvel Adam,
une préfigure du Christ et du chrétien triomphant du démon et de la mort. Ce
même geste, à côté de scènes comme le Miracle de Cana ou celui de la Multiplication
des pains et des poissons, évoque de plus le caractère sacrificiel de
l’eucharistie et son instauration.
Dans ces œuvres,
Daniel est le plus souvent représenté accompagné du roi et plus rarement du
Christ-Logos (coupe
du British Museum et sarcophage de Malpasso). Le prophète se tient généralement de
face (exceptionnellement
de dos sur le sarcophage de Pretextato). Imberbe, il tourne sa tête nue
et dépourvue de nimbe vers le serpent. Il est le plus souvent vêtu, à la
romaine, d’une tunique longue et d’un pallium et chaussé de sandales mais est
parfois vêtu à la mode persane, avec une tunique courte, des pantalons longs et
étroits resserrés aux chevilles et un manteau (coupes du British Museum et d’Homblières). Il tient
parfois, de la main gauche, un pan de son manteau ou bien le rouleau de la Loi.
Le serpent se
tient indifféremment à la droite ou à la gauche du prophète et s’enroule
souvent autour d’un tronc d’arbre comme le serpent du Péché originel
autour de l’Arbre de la Connaissance. Il se dresse parfois devant un temple
comme nous l’avons vu, ou bien devant une colonnette ou un pilier servant
d’autel ; sur cet autel brûle alors une flamme de célébration de son culte
(sarcophage du musée
d’Arles, n° 10, sarcophage de San Giovanni in Valle de Vérone) ou bien
reposent les offrandes ou les pains empoisonnés
(sarcophage
de Saint-Trophime d’Arles).
Sarcophage (détail), Vérone, San Giovanni in Valle, IV° s.
Le serpent saisit de sa gueule et mange l’une des
boules tendues par Daniel, s’affaisse ou, plus rarement, gît déjà mort sur le
sol (sarcophage du
musée d’Arles, n° 10).
Son corps plus ou moins long et épais, peut adopter une tête de basilic (roi des serpents) couronnée d’une
crête (coupe du
British Museum, sarcophages de Mantoue, de la Villa Doria Pamphili et du
Latran).
Sarcophage (détail), cathédrale de Mantoue, fin IV°-début V° s.
Sur les
médaillons circulaires en verre doré de petites dimensions, Daniel, le plus souvent seul, se
détache sur un fond orné de végétaux, portant une grosse boule de pain destinée
au serpent d’un médaillon voisin (Città
del Vaticano, Biblioteca, Museo Sacro ; Londres, British Museum ;
Oxford, Pusey House).
Médaillon en verre doré gravé, Londres, British Museum.
Ces sculptures
et gravures s’inspirent peut-être de cycles narratifs de la Bible ornant
des manuscrits aujourd’hui disparus ; les scènes semblent cependant
absentes de la peinture monumentale et de la mosaïque de cette époque.
Les thèmes se
maintiennent certainement après le IV° siècle, en particulier dans les
territoires marqués par l’empreinte des œuvres romaines, mais se font plus
rares : une amulette syrienne du V° siècle (?) (provenant de Palestine ?) semble cependant montrer la scène de Daniel empoisonnant le Serpent (Kelsey Museum, Ann Arbor,
Michigan),
affirmant la fidélité à Dieu, le refus de l’idolâtrie et du péché et protégeant
du mal et de la mort.
Amulette syrienne conservée au Kelsey Museum, Ann Arbor, Michigan, n° 26125.
Une pyxide en
ivoire du VI° siècle, de style byzantin (provenant
de Moggio Udinese, conservée à
Washington, Dumbarton Oaks Collection),
présente
successivement, pour sa part, un grand aigle aux ailes éployées (image de la parole et de la
justice divines),
Moïse recevant la Loi accompagné d’Aaron et ses fils, Daniel dans la
fosse aux lions (bras
levés entre deux tours circulaires et deux lions adossés dont les gueules sont
fermées par deux anges symétriques), et enfin l’épisode de Bel et du
Serpent, avec le serpent tête basse, vomissant et agonisant, enlacé autour
d’une colonnette torse portant l’idole de Bel.
Pyxide polychrome en ivoire (détail), provenant de Moggio Udinese, Syrie (?), VI° siècle, Washington, Dumbarton Oaks.
Cette œuvre mérite une attention
toute particulière car elle évoque la puissance de Dieu qui sauve le chrétien
de la mort mais détruit ses ennemis et elle identifie nettement le lien entre
les épisodes de Daniel et le pain eucharistique traditionnellement contenu dans
la pyxide. C’est de plus la première et unique œuvre connue qui représente tout
à la fois le serpent enlacé autour d’une colonnette et l’idole du dieu Bel
reposant sur cette même colonnette, reliant clairement les deux épisodes et le
deux divinités. Le dieu Bel adopte ici une forme humaine (à la tête animale ou
monstrueuse ?) et
se tient debout, tenant un objet non identifiable de la main gauche et une
lance de la droite, attribut traditionnel de la divinité babylonienne.
En dehors de la
scène de Daniel dans la fosse aux lions qui reste courante, aucune œuvre
conservée ne témoigne plus de la permanence des thèmes entre le VII° et le X°
siècle.
LISTE DES ŒUVRES PALÉOCHRÉTIENNES
RECENSÉES
SARCOPHAGES (FRANCE)
9 sarcophages :
5 à Arles (1, musée n° 19, vers
330-340 ; 1, dit de Jonas, musée n° 27, vers 330-340 ; 1 de l’église Saint-Trophime,
provenant de l’église Saint-Honorat aux Alyscamps, vers 350 ; 1, dit
eucharistique ou de Sainte-Dorothée, musée n° 10, fin du IV° s. ; et un
fragment isolé, IV° s.) ; 1 au musée de Narbonne ; 1 sarcophage de
Balazuc (Ardèche) au musée de Lyon ; 1 sarcophage du château de
Grozon (Ardèche) (collection R.Giraud) ; 1 à Bédoin (Vaucluse), chapelle
Sainte-Madeleine.
SARCOPHAGES (ITALIE)
12 sarcophages :
9 à Rome (1 au musée Pio Cristiano Vaticano, Lat. 179, Inv. N° 31536, vers 350 ;
1 à Saint-Pierre du Vatican, museo Delle Grotte, sarcophage dit des Trois
monogrammes (vers 320-330) ; 1 à
San Lorenzo extr. ; 1 fragment à la Villa Doria Pamphili ; 1 au musée du
Latran, Vatican, couvercle, Lat. 136 ; 1 d’Aguzzano, au Museo
Nazionale Romano, Inv. N° 113247, vers 325-350 (scène très partielle) ; 1 de
Malpasso, Museo Nazionale Romano ; Roma, San Sebastiano ; Roma,
cimetière Pretextato) ; 1 à Civita Castellana, Palazzo vescovile
(Episcopio, sarcophage C), vers 350-380 ; 1 à la cathédrale de Mantoue, fin
IV°- début V° s. ; 1 à Vérone, San Giovanni in Valle.
SARCOPHAGES (ESPAGNE)
1 sarcophage : 1 fragment de sarcophage de Tarragona, museo paleocristiano, n° 466,
fin du IV° s.
SARCOPHAGES (ALGÉRIE)
1 sarcophage : 1 au musée Stéphane Gsell d’Alger (sarcophage C, de Dellys, Numidie, vers 345-370).
COFFRET (ITALIE)
1
Coffret-reliquaire du IV° s. en ivoire (lipsanoteca eburnea) au museo cristiano
de Brescia, vers 370.
PYXIDE (U.S.A.)
1 pyxide en
ivoire du VI° s., originellement polychrome,
provenant de Moggio Udinese et conservée à Washington, Dumbarton Oaks
Collection.
VAISSELLE FUNÉRAIRE-VERRES DORÉS (FRANCE)
1 coupe (trouvée à Homblières près d’Abbeville, Aisne), vers 350-360 : musée du Louvre.
VAISSELLE FUNÉRAIRE-VERRES DORÉS (ITALIE)
3
médaillons : Città del Vaticano, Biblioteca, Museo Sacro.
VAISSELLE FUNÉRAIRE-VERRES DORÉS (ESPAGNE)
1 fragment de bol gravé (importé d'Italie), trouvé dans les fouilles de la plaza de la Almoina de Valencia, fin IV-début V° s.
VAISSELLE FUNÉRAIRE-VERRES DORÉS (GRANDE-BRETAGNE)
1 fragment
d’assiette et un médaillon : British Museum de Londres.
3
médaillons : Oxford, Pusey House.
AMULETTES (GRANDE-BRETAGNE)
1 amulette
d’origine palestinienne du V° s., citée sans référence ni image, Oxford, Classical Art Research Centre and the Bearzley Archive.
AMULETTES (U.S.A.)
1 amulette
syrienne (Kelsey Museum, Ann Arbor, Michigan, n° 26125), non datée.
BIBLIOGRAPHIE
SOMMAIRE
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na iconografia paleocristà, T I Estudo interdisciplinar, T II Catàlogo
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gold-glass collection of the Vatican Library with additional catalogues of other
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Londres, British Museum, pl. XXX, fig. 322 et 345 ; Oxford, Pusey House, pl. XXXII, fig. 371,
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« Prophètes légendaires : Daniel », Iconographie de l’art
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- SOTOMAYOR (Manuel), Sarcofagos
romano-cristianos de España – Estudio iconográfico, Biblioteca Teologica
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- STOMMEL (Eduard), Beiträge zur Ikonographie der Konstantinen
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figurativa paleocristiana », L’uomo di fronte al mondo animale nell’alto
medioevo, 7-13 aprile 1983, Presso La Sede Del Centro, Spolelo, T II, 1985
p 1107-1168 (Daniel et le dragon p 1141, 1150-1156 et pl. XXV,33).
- WILPERT
(Giuseppe), I sarcofagi cristiani antichi, 3 tomes en 5 volumes,
Pontificio Istituto di Archeologia Cristiana, Rome, 1929-1936.
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